mercredi 25 février 2015

L'Espoir des ténébres ...

SOUVENIRS DE JEUNESSE je n'ai pu résister au besoin de rappeler le courage et l'héroisme  de ces hommes qui ont contribué à notre libération 
Nombreux furent ceux qui  ont fait le sacrifice de leur vie  lors de ces nuits d attente, de veille ,et 
d 'inquiétude

Reflexions personnelles et extraits de" l'espoir des ténébres "

L’espoir des ténèbres « 

L’avion et la radio ont révolutionné  les moyens d’action des belligérants de la seconde guerre mondiale ,imposant des changements fondamentaux à la nature ,au déroulement et aux formes de la lutte
.On peut  dire que la BBC réglait l’ existence de la plupart des français tout au moins pour ceux qui accordaient la plus grande confiance aux alliés en écoutant les nouvelles transmises par Robert  Schuman   , Jean Marin  , Pierre Jourdan .On commençait à ressentir  une sorte de  tressaillement aux premiers succés alliés qui commençaient à se dessiner
En résumé l’exaspération et la rancune des hommes plaçés sous le joug germanique se faisaient de moins en moins silencieuses
Pour ce qui est de la lutte clandestine une évidence s’impose : ces conquêtes techniques ont constitué des atouts aux effets incalculables . Qu ‘aurait été en effet la résistance si les combattants de l’ombre n’avaient eu aussi pour eux l’azur et le ciel ? Sans la voie des airs sans la possibilité offerte de la sorte à la France libre et aux alliés de pénétrer au coeur du territoire occupé par l’ennemi  ,en se jouant de la mer ,des frontiéres et des fortifications ,comment les groupes de résistants auraient ils pu communiquer , recevoir des armes , accueillir ou envoyer des agents ? Et sans la télégraphie sans fil  ,sans les émissions des radios clandestins éparpillés à travers la France  ,sans les écoutes de Londres ,sans les messages personnels de la BBC ,comment auraient pu s’effectuer les liaisons , se transmettre les instructions , s’échanger les renseignements ? 


Note        ( les réseaux actions de la France combattante )
                    Les terrains étaient soigneusement préparés' ( dans lesecteur sagien les terrains ....)   avant de demander une opération aérienne qu’ elle soit de parachutage ou d’atterrissage il fallait d’abord rechercher l’endroit où elle pourrait être effectuée avec le maximum de chances de réussite et la meilleure sécurité possible   les normes exigées de ce que l’on appelait «  le terrain » variaient selon le genre d’opération auquel il était destiné C’était en fait le travail du BOA dont le chef incontesté pour le département était Edouard Paysant
La recherche de terrains était confiée en principe aux responsables départementaux   les emplacements possibles lui étaient signalés la plupart du temps par des unités de résistance 
Il était toujours préférable de trouver une grande étendue les alentours devaient être assez dégagés pour faciliter la recherche des containers ou paquets parfois dispersés sur une grande distance ce que  ne favorisait pas une forêt attenante 
Pas d’arbustes trop hauts qui pourraient cacher les lumiéres du balisage 

Il était souvent nécessaire que le terrain soit éloigné non seulement de toute présence de miliciens , d’allemands ‘ susceptibles d’intervenir rapidement mais plus généralement de toute habitation à moins que les habitants soient bien connus comme sympathisants et qu’il n’exista aucun risque de dénonciation ou de bavardage
En effet un bombardier quadrimoteur  qui rôde au dessus de la campagne pour rechercher le terrain repasse plusieurs fois au même endroit ,descend à 150 métres pôur lâcher ses parachutes , remet ses moteurs à plein régime pour reprendre de l’altitude et cela fait beaucoup de bruit dans le silence de la nuit …..
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Largage de conteneur
Recherche du terrain par l’avion lanceur de containers
Nuages, la brume ou la pluie. Cette opération  constitue en fait une cible de choix du point de vue de la chasse allemande, malgré la présence de la pleine lune. Il y eut bien sûr des échecs… erreur de navigation, incident mécanique, absence du réseau de résistance pour des raisons indépendantes de leur volonté, terrain invisible, la météo...
Trop bas les colis risquaient de s’abimer au contact du sol. Trop haut, dispersés par le vent  , des résistants au sol menaçés par la présence d éléments inattendus  les colis étaient alors ramassés par les allemands ou des mains étrangères.

Les terrains :  Aurore, Godet ,lapin, Eclair Goudron, Orage et d’autres encore   environnant notre ville seront le théâtre de parachutages très risqués,de containers  recueillis par des hommes défiant tous les dangers.On peut malheureusement citer plusieurs parachutages qui se sont très mal terminés dans notre région, au Merlerault par exemple, où  plusieurs membres du comité de réception furent arrêtes et déportés, victimes de dénonciations

Terrain balisé vu d'une altitude de 500 métres

Je joins ci dessous quelques témoignages des acteurs présents sur les lieux et incluant un commando de patriotes courageux   J’ai respecté la  chronologie que j’ai pu lire ou recueillir pour l’intégrer dans ce journal En tout cas ces témoignages   démontrent  que l’activité de la resistance en relation avec cette  vie aérienne était très  sensible  dans notre région particulierement pendant cette période de  pleine lune

Le terrain Lapin


Prenons pour exemple l’utilisation du terrain Lapin situé au vieux Montmerrei   
Les messages codés diffusés par la BBC annonçaient généralement une operation  de largage sur ce terrain  
 Proposé par  Edouard Paysant et homologué par la RAF   ,situé  à 1km au nord ouest de Mortrée il  pouvait être identifié à partir des coordonnées précises suivantes à l’aide de la carte Michelin no 60
  0.7  mm   E 0250 
  35  mm    N 5400
Quelques exemples de messages  codés emis par la BBC aux horaires de                      et recueillis par les resistants

«  Chaque tiroir a sa clé « 

« Noémie a un bouquet de violettes «   
« Elle a cueilli de pleins paniers de fraises « 
« Nous aimons le civet « 

Poste emetteur transportable pour la communication entre comité de réception au sol et l'avion

Les membres du comité de réception se donnaient generalement rendez vous prés de l’église  .de Montmerrei    Les communications avec la BBC de Londres étaient assurées par  Mr Riviére habitant Belfonds 
Mr Cosnard cultivateur et habitant Saint Clair apporte le  témoignage suivant extrait de « Histoire d’une ville Argentan » 

Nuit du 10 au 11 Juin 1943 veille de la pentecôte  ( correspondant à la lunaison et à la pleine lune du 18 Juin ) 
Message convenu et émis par la BBC : «  Claude a un joli chapeau « 

Le parachutage est réussi et   10 containers   dont 4 de matériel médical sont  récupérés par le comité de réception 
Le Chef de terrain est Victor Chevreuil  maire de Mortrée  .(Trois semaines plus tard Victor Chevreuil hébergera pendant trois   semaines six rescapés du crash  de la forteresse volante
Mouton agriculteur prés de Sées et le groupe du « Sanglier «  de Tanville sont venus renforcés l’équipe de réception  
« C’était Despierres  , boulanger à Sées place des halles qui m’avait proposé de rentrer dans la résistance .Il me mit en contact avec Edouard Paysant . Celui çi  m’avait  demandé de trouver des hommes sûrs . J’ai contacté Martin  ,de Saint Hilaire la Gérard , Lemeunier docteur à Mortrée . Faisaient aussi partie du groupe Rallu marchand de porcs qui était allé à l’école avec Paysant et Tancray un cousin  ,Louvel et Riviere

NP  Martin et Tancray cacheront dans une remise  en Juillet et Août 1944 le pilote d’un lightning de l’ USAAF    abattu le 6 Juillet prés de Montmerrei . J’ai pu retrouver les traces de cet américain Jim  en 1998  sans pouvoir malheureusemnt établir un contact  suivi
Suite à cette même affaire J; Cosnard et son épouse seront  déportés les 3 et 20 Juillet 1943  mais reviendront de déportation
: «  Paysant m’avait dit que si j’entendais le message personnel «  Claude a un joli chapeau « c’était un parachutage pour nous ,Sa fille Françoise est d’ailleurs venue me le confirmer pour que je prévienne Martin . Le rendez vous était convenu à la chapelle du vieux Montmerrei avec Lemoine et nous avons retrouvé Chevreuil sur le terrain , les  Tessier alias  «  Le sanglier «  et ses fils «  les marcassins «  y étaient aussi
Ballavoine de Saint Christophe le Jajolet était avec sa voiture à cheval pour le transport des containers et des colis .C’était huit jours avant la pentecôte
Pour camoufler les dégâts causés aux cultures par nos allées et venues nous avons ouvert les barriéres aux bestiaux dont les traces ont effaçé les nôtres
Les parachutes ont dû être jetés dans l’étang de Vrigny aprés avoir été lestés ( Etang de Vrigny situé à  12  km  au nord ouest    de Sées  ,2 km ouest de Montmerrei ) 
Les containers sont restés à Belfonds  huit jours à la ferme et j’ai reçu l’ordre de les conduire chez Septier , menuisier à la Ferriére Béchet puis ensuite à Tanville ce qui ne m’avait pas été indiqué d’ailleurs...



Le samedi suivant  ,veille de la Pentecôte le message émis par la BBC  «  Nous mangeons de la salade à l’orange «  annonçait un parachutage à Saint Léonard des Parcs  
Annie Rospabée apporte le témoignage suivant ,concernant le parachutage de la nuit du 10 au 11 Juin 1943   sur le terrain Lapin  ( Source « L’épreuve « de  Annie Guehenno ex Annie Rospabée  )
« C’est à Sées chez Edouard Paysant que j’ai rempli ma premiére mission quelques jours aprés mon engagement au BOA c’est à dire au début de Juin 1943 
Par une porte entrouverte j’aperçus des paillasses alignées les unes contre les autres dans une piéce où l’on avait reculé les meubles contre le mur .   Edouard Paysant alias Dominique Tinchebray m’expliqua qu’un parachutage avait eu lieu la nuit même ,vers une heure du matin ; Ses hommes et lui étaient rentrés à l’aube et venaient seulement de se lever . Ce devait être l’une de leurs premiéres opérations
Sées ....Vieil évêché , ses rues étroites aux riches maisons enserraient une magnifique cathédrale portant comme des pansements les sacs de sable dont on protégeait les églises et les monuments en ce temps là  .Tout était gris austére et noble ... 
L’aprés midi Dominique me remit la liste des armes parachutées avec deux ou trois colts ...
Le malheur arriva trés peu de temps aprés....
Ci joint en annexe un article de Brigitte Friang secrétaire de Clouet des Perruches( délégué régional de la région Ouest )  et qui participait à l’opération avec l’équipe de Mortrée

Témoignage résumé  de Brigitte Friang .  Extrait de «  Regarde toi qui meurs «  terrain Lapin"

Clouet  , et le pére Terrier  entrepreneur à Alençon et deux autres passagers dont Andre Gros ( alias Minet )étions  entassés dans la « traction avant «  conduite par un « blondinet «  de 20 ans  .  . Nous étions sur place depuis onze heures du soir . La phrase code était passée deux fois sur la BBC .Nous percevons le bruit d’un avion dans le lointain ,...les lumiéres du balisage étaient  allumées . C’était un L formé de 3 lampes  torche ...
Aprés plusieurs heures d’une attente vaine.....  ,la voiture  prit le chemin du retour et roulait lumiéres éteintes en raison du couvre feu .
Le S phone était dans le coffre  ,et sans permis spécial il était périlleux de circuler  à cette heure trop matinale
Au loin des lumiéres s’agitent dans le brouillard ...  .Celles de sentinelles allemandes  Nous roulons trés vite ... Clouet s’ést réveillé et décide de forcer le  barrage .. Des coups de feu claquent ....la voiture tangue ... 
Enfin un chemin de traverse salvateur nous permet in extremis d’éviter le barrage

NP Brigitte Friang  secrétaire de Clouet des Perruches sera  arrêtée en Mai 1944   et déportée à Ravensbruck

Nous avions attendu le lever du jour . Nous étions glacés . Mornes , aussi . L’opération avait raté . Au reste les équipes de réception craignaient ma présence comme la peste . Il me suffisait d’apparaitre à un parachutage et l’opération échouait . En place sur le terrain Lapin depuis onze heures du soir nous avions attendu l’avion anglais qui devait nous parachuter des armes . La phrase de code était passée deux fois à la BBC . Les opérations s’effectuaient en période de lune dont la clarté était indispensable pour le repérage des terrains par les avions et des containers par les receveurs . Aussi notre planning s’organisait il en lunes et nous appelions nous les gens de la lune ,trés contents de notre jeu de mots
Vers une heure du matin dans le ciel gris de lune nous avions repéré un lointain bruit de moteurs d’avion . L’appareil semblait chercher . Nous avions allumé le balisage . C’était un L formé de trois lampes torches . La lettre indiquait le sens du largage en fonction du vent et de la forme du terrain . Dans le  micro du S.phone Jean François ( Clouet des Perruches ) s’était employé à attirer l’avion dans le faisceau de son appareil «  Here  Here France calling ...France calling . » Nous étions sortis du couvert des arbres . La haute silhouette de Clouet se découpait dans le ciel . Cette voix qui eut pu être britannique tant l’accent était parfait résonnait étrangement dans le silence de la nuit normande ,l’immobilité des hommes et des choses que soilignait le bourdonnement vague de l’avion . Néammoins tout autour du terrain on eut pu entendre les coeurs battre .






Battre d’émotion d’espoir . Venu d’Angleterre pour larguer ses passagers et ses cylindres métalliques de matériel .....l’avion symbolisait la réussite d’éfforts de centaines d’hommes et de femmes qui risquaient toutes les minutes leur vie pour cela ...des parachutes se balançant dans le clair de lune  . Quelle belle image !!!


 

 

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